La tour, instrument écologique
Comme l’indique Jean Nouvel, architecte de renommée internationale, "un ascenseur pollue moins que des bagnoles". Evidemment, il s’agit là pour Jean Nouvel de vanter les atouts écologiques d’une tour de bureaux, autrement dit d’un IGH (immeuble de grande hauteur) tertiaire.
Tour Jean Nouvel (88m) Boulogne-Billancourt
A l’évidence, une tour est une construction écologique en ce qu’elle permet de regrouper sur un même site des activités multiples. Par cette concentration, une tour réduit les flux horizontaux qui sont les flux les moins écologiques. En effet, ces flux encouragent l’utilisation des voitures pour établir la liaison entre plusieurs secteurs là où des flux verticaux ainsi que des flux horizontaux limités s’inscrivant dans un véritable pôle tertiaire facilitent l’utilisation de transports en commun tels que les ascenseurs ou le tramway. C'est aussi la position de Rémi Royer, architecte, qui considère qu'il est indéniable que "construire en hauteur évite l'étalement urbain et permet de limiter les déplacements". Par ailleurs, le second article de la rubrique "généralités" signé par Mynight montre excellemment bien l’intérêt d’une tour dans la gestion rationnelle des énergies. Ainsi Mynight rappelle-t-il que le "coût en matière d’énergie [d’un IGH tertiaire] – pour le chauffage et la climatisation notamment – est moindre que pour des immeubles éparpillés comportant le même nombre d’employés." Un autre aspect écologique des tours, c’est qu’elles permettent de libérer une emprise considérable de tout bâti. Il suffit d’observer l’aspect de l’étude TGT pour s’en convaincre. En effet, cette étude conduirait à bétonner une grande partie de l’emprise réservée au centre d’affaires par des bâtiments en R+3, R+4, R+5 alors que nous pourrions imaginer que de tels bâtiments soient regroupés au sein de deux grandes tours. A l’occasion d’un échange par courriers électroniques où je soumets cette remarque à Madame Larüe-Charlus, celle-ci m’a répondu que l’on n'additionnait pas les m² comme des briques. Je ne suis certainement pas d’accord avec elle : ce que l’on ne peut additionner ce sont des étages puisque deux étages peuvent avoir des surfaces différentes, donc un étage ne vaut pas nécessairement un autre étage. En revanche, un m² vaudra toujours un m². Imaginons donc que ces vulgaires bâtiments " rase-mottes " dont on ose vanter la dimension européenne soient regroupés au sein d’une tour. L’espace dégagé pourrait devenir un espace vert alors que les parcs envisagés dans l’étude TGT relèvent du patchwork en dehors de l’énorme parc urbain : un autre grand espace vert en lieu et place de bâtiments sans intérêt architectural (alors que Monsieur Juppé avait fait campagne notamment sur la nécessité d’un geste architectural fort pour Belcier) et d’une galerie marchande à une époque où la Communauté urbaine critique la présence en trop grand nombre de surfaces commerciales. Avec l’omniprésence de l’élément naturel, Belcier constituerait à n’en pas douter le " poumon " de Bordeaux et de son agglomération. Finalement, une tour est a priori si écologique que certains architectes n’hésitent pas à affirmer qu’aucun local individuel ne pourra prétendre à ce même qualificatif, encore moins au label HQE (haute qualité environnementale).
Photographie : Grant Smith
Tour Swiss Re à Londres
En effet, certains architectes et urbanistes, constatant que le développement de l’habitat et des locaux individuels ne jugulait pas les flux horizontaux mais pire participait à l’étalement urbain, ont considéré qu’une maison HQE était un non-sens en ce que son emprunte environnementale n’était que partiellement limitée. C’est là le signe d’une vision globale de la norme HQE qui est trop souvent réduite au recours à des matériaux et à des techniques de construction écologiques. Seule une tour peut véritablement être de haute qualité environnementale puisque seule une tour peut contenir l’étalement urbain. Pour en revenir à la définition traditionnelle de la norme HQE, la plupart des cabinets d’architectes ont intégré cette contrainte et de plus en plus d’étudiants en architecture et en urbanisme sont familiarisés à cette norme. Par conséquent, les projets fleurissent et la haute qualité environnementale est désormais incontournable. Une tour peut effrayer les habitants alentour et la norme HQE est un moyen novateur pour tenter de faire accepter ce type d’urbanisme par les habitants : une tour HQE est une réponse aux préoccupations écologiques qu’ont manifestées beaucoup de Français. Souvent le débat sur la protection de l’environnement se réduit au débat énergies renouvelables/énergies fossiles, les intervenants qui parfois ne sont autres que des ministres, par exemple de l’Ecologie, du Développement et de l’Aménagement durable, oubliant que l’urbanisme vertical est une réponse tout aussi valable que des éoliennes de 120m de haut (comme annoncées à Bacalan, habitants rassurez-vous, elles seront véritablement de dimension européenne et même mondiale !) aux défis écologiques auxquels nous devons faire face.
"Tour vivante" pour la ville de Rennes
Architectes : Pierre Sartoux et Augustin Rosenstiehl
Oui à un centre d’affaires écologique et de dimension européenne !